mardi, 8 avril 2008

San Blas (3ème partie)

Voici la troisième partie de notre périple aux San Blas, la suite arrive.....
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Il nous faut nous rapprocher maintenant d’un plus grand village afin de faire le plein en victuaille de base (farine, œufs, lait, riz) Nous quittons donc Tiadup pour nous rendre à Nargana, mais sur le trajet, il y a Isla Verde, nous décidons d’y faire une escale. Occasionnellement des familles viennent sur l’île pour ramasser des cocos, mais en ce moment il n’y a personne. Des orchidées poussent sur les cocotiers, et quelques autres fleurs décorent la côte sous le vent. Un puits me permettra de faire un peu de lessive. Marvin n’a aucune envie de piquer une tête, il préfère jouer avec Vincent sur Quo Vadis. Thierry et Gérard partent à la chasse, il y aura deux petits thazard dans les assiettes pour le souper. Au contour d’un banc de coraux en fleurs, je surprends un requin nourrice d’env. 2.50m. de long posé sur le fond. Dérangé dans sa sieste, il se déplacera avec lenteur dans un coin plus tranquille.



La côte au vent est nettement moins accueillante avec tous les déchets qui s’y accumulent. Les écolos ont encore bien du travail dans ce monde !



Nargana est un village de taille moyenne, il y a une banque, un mini hôtel, un dispensaire avec une maternité, une base de l’armée avec un centre de détention préventive (15 détenus pour trafic de drogue, attendent leur transfert sur Panama) une école, une bibliothèque publique (fermées car c’est les grandes vacances en ce moment), quelques boutiques où il est possible de trouver un peu d’avitaillement dont la Tienda Eidi,



rien à voir avec un supermarché, mais ça fera l’affaire, de toute manière il n’y a pas le choix, alors on se contente de ce que l’on trouve, la mer nous fournissant le reste. Ce soir nous nous offrons un resto, puisque resto il y a sur l’île, avec vue sur mer et sur les WC. Au menu, poulet, frites, ketchup et pour les enfants qui n’y croyaient plus, une boule de glace au chocolat, c’est la fête.


A Nargana, il faut également payer un droit de mouillage, valable un mois : 6US$ pour le bateau et 1 US$ par personne à bord, exception pour les enfants. Un petit aéroport amène son lot de touristes, les bateaux charters en profitent pour changer les équipages. Nous qui avions entendu que le charter était interdit aux San Blas !

Nos réserves d’eau touchent à leur fin, nous en commandons à Paco, le kuna en charge de l’eau à Nargana. Quo Vadis sera livré le lendemain. Nous, nous attendons toujours, heureusement que la pluie s’est mise à tomber ça nous a permis de remplir la moitié nos réservoirs. Nous partons faire une balade avec les annexes sur le Rio Diablo. A peine partis, voilà que Vincent passe à l’eau, la rivière est marron, on ne sait pas trop ce qui grouille par-dessous, Claudia et Gérard s’empressent de le repêcher, surtout que lors d’une balade sur un autre rio, ils avaient aperçus de petits caïmans. Le coup d’adrénaline passé, nous remontons ce cours d’eau pendant plus d’une heure au moteur en évitant les troncs qu’il charrie, tout en espérant croiser nous aussi de petits crocos. Le retour se fera à la pagaie, nous laissant dériver dans le courant afin de bien admirer la nature et de profiter des cris des oiseaux à défaut d’animaux rampants à part ce lézard qui, lorsqu’il est dérangé court si vite qu’on dirait qu’il marche sur l’eau.



De la pluie pendant deux jours sans vent, cela amène des nonos en pagaille. Ils nous dévoreront toute une nuit sans que nous puissions quitter le mouillage ou faire quoi que ce soit. Toutes les bombes insecticides du bord sont vidées, mais restent inefficaces contre ces minuscules bestioles qui s’infiltrent partout, même à travers les mailles des moustiquaires.



Le lendemain, c’est sans regret que nous lèverons l’ancre pour le Cayo des Cocos Banderos, des îles loin de la côte, ventées et sans nonos, où il fait bon s’y prélasser.


Vincent dormira à bord de New Life une nuit. C’est deux moussaillons qui prendront leur petit-déj et feront l’école ensemble dans la joie et la bonne humeur avant qu’on se retrouve tous sur la plage autour d’un barbecue grâce à Sophie et Alain de Patago qui arrivent directement de St-Martin avec deux dorades coryphènes pêchées en route.



Par radio nous apprenons que Gigi et Lulu du Roi Soleil, José et Fanfan d’Amuitz sont revenus de Portobelo, ils sont au Cayo Est Lemon. Ils ont du ravitaillement pour nous, nous quittons donc les Cocos Banderos pour les rejoindre. A peine sortis du mouillage, nous hissons la grand-voile et déroulons le génois, nous ferons le trajet à 5,3 nœuds avec un vent nord-est de 15 nœuds sur une mer calme, tout le monde a du plaisir pour cette petite nav. de quelques heures. Chaleureuses retrouvailles avec nos amis. José demande à Thierry de lui modifier l’emplacement de son guindeau (winch de l’ancre), ils travailleront de concert pour arriver à terminer avant l’arrivée du frère de Fanfan qui vient passer quelques jours de vacances à bord.



Nous quittons leur joyeuse compagnie pour visiter des villages plus typiques. Sur le trajet nous ancrons entre Wichubhuala et Nalunega deux îlots au sud de Porvenir, nous sommes seuls au mouillage, qui une fois bien assuré, nous laisse tout le temps de nous rendre à terre. Quelques boutiques avec un approvisionnement possible puisque le bateau de Panama, vient de livrer le pueblo. Je trouve même de la mayonnaise, cela faisait plus d’un mois qu’on en cherchait, des biscuits sucrés pour moussaillon et quelques saucisses qui changeront le menu du soir. Les rues sont d’une propreté incroyable et les cases magnifiquement entretenues et décorées. Les enfants nous suivent partout, on nous interpelle à tous les coins de « rues » pour nous vendre des molas.



Au village de Nalunega, nous apporterons des clous de girofle pour soigner une rage de dents de Fernando, le Nele (soigneur) du pueblo qui ne peut malheureusement rien faire pour que son mal diminue, nous luis suggérons tout de même, vu l’état de sa dentition qu’il ne s’est pas gêné à nous montrer, d’aller voir un dentiste ! Nous recevons des regalos (des cadeaux de leur part) une mola pour Marvin, un collier et un wini de plus pour moi, ce dernier entourera ma jambe gauche cette fois-ci. Après nous avoir accueillis à l’intérieur de leur hutte, Lisa et sa fille viendront à bord pour voir notre « habitation flottante ».


Puis nous levons l’ancre pour nous rendre dans d’autres villages, encore plus typiques au fin fond du Golfe des San Blas, les Iles Robeson. Une navigation de deux heures au moteur, faute de vent nous emmène au Cayo Guardo que nous contournons pour remonter jusqu’à Tupsuit Dumat, dit Gertie. Des dizaines de petits Ulu (cayucos, pirogues) remplis d’enfants nous entourent, tout le monde vient nous rendre visite. Les questions fusent Bea daniki ? (d’où venez-vous ?) Be iguinuga ? (comment t’appelles-tu ?) Igui birganika (quel âge as-tu ?). Les femmes nous proposent leurs molas, les hommes des fruits de leur plantation. Une fois ancrés, nous sommes disponibles pour faire connaissance. Bredio se présente, nous demande la taxe locale qui est de US$ 5 et nous explique les règles locales. Ici il faut d’abord rendre visite au Sahila (chef spirituel et coutumier) avant de pouvoir nous balader librement au village.

Nous avalons notre lunch vite fait et demandons à Bredio de passer en début d’après-midi afin de nous plier aux coutumes locales. Une fois le premier sahila rencontré – à qui Bredio donne les 5 dollars de taxe perçue à notre arrivée – nous engageons la conversation avec cet homme sage et en apprenons un peu plus sur la vie kuna.



De 7 à 9h tous les soirs les hommes se réunissent dans la hutte du congreso. Le Sahila est assisté par un voire deux autres sahilas. Ces derniers sont choisis en fonction de leur sagesse et de leurs connaissances des traditions du peuple kuna, mais, avant qu’ils puissent postuler, ils ont acquis leur savoir des anciens qui le leur ont transmis au cours de longues séances de chants historiques.


Lors de ces réunions quotidiennes, le Sahila règle les petits litiges entre villageois et si nécessaire, juge de la gravité des bêtises commises. Il psalmodie des chants traditionnels, la religion, le respect de la nature et le civisme en sont les sujets principaux. Les femmes quant à elles se réunissent une ou deux fois par semaine de 4 à 6 h. souvent les enfants les accompagnent. Les femmes seraient-elles plus sages ?

Une fois les présentations faites, Bredio nous emmène visiter le village, des dizaines d’enfants nous suivent en rigolant. Marvin impressionné ne me lâche pas la main, il est un peu intimidé, n’ayant pas l’habitude d’être observé de la sorte. Quelques têtes féminines pointent des cases et disparaissent à nouveau, à l’angle d’une autre c’est une femme torse nu, qui s’empresse de se couvrir et de se cacher. Nous arrivons à l’autre bout du village et rencontrons le deuxième Sahila. Nous bavardons un peu avec lui grâce à l’aide de Bredio qui parle parfaitement l’espagnol et qui nous traduit en kuna. Ce deuxième sahila nous demande s’il est possible de fixer le tableau arrière de son ulu (cayuco, pirogue) qui va devoir supporter un moteur 15 CV. Thierry lui fait dire qu’avec de l’époxy cela ne pose aucun problème et que demain, s’il le désire il peut venir lui faire le travail, mais qu’auparavant, il faudrait affiner la préparation de l’arrière et le mettre d’équerre afin que la pièce de bois venant en appui plaque parfaitement. Marché conclu, à demain 10h00.

Un petit-déj, un peu d’école, allégée ce matin et nous voilà débarquant avec Thierry pour effectuer le travail sur le ulu communautaire. Laurent de Paco, qui est également au mouillage avec sa petite famille, nous accompagne pour donner la main à Thierry. Tout le village nous attendait de pied ferme. L’arrière du ulu a été ajustée comme on l’avait demandé la veille, restait à tailler la pièce de bois pour le tableau arrière. Vu son épaisseur, on pense qu’il y en aura pour trois jours. Que néni…. Une demi-heure et quelques bons coups de hache précis permettront d’en venir à bout, et ce avec une précision incroyable. Reste plus qu’à faire des trous au vilebrequin et la fixer à l’époxy. Comme un travail n’arrive jamais seul ici, Laurent s’occupe de boucher quelques tous dans le ulu avec des restes de résine.



On nous remerciera pour le travail, ce qui est rare dans la coutume indienne. Nous recevrons en cadeau deux yucas que nous partagerons avec Paco. Depuis ce travail, les gens se sont habitués à nous voir sur l’île, les portes se sont ouvertes, laissant tomber les barrières de la timidité, nous sommes acceptés dans la communauté.

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