lundi, 21 avril 2008

Trajet San Blas/Providencia + Providencia (renseignements pratiques) 22.4.08

Salut les amis,

Lundi 31 mars, à 10h00 nous levons l’ancre, nous quittons les îles San Blas pour Providencia, distante de 275 miles. Les copains s’activent sur leur pont pour nous dire bye bye. On retrouvera certains plus loin, mais pour d’autres c’est nettement moins sûr car nos routes se séparent. Il y aura toujours internet, la BLU et les moyens de communication modernes pour suivre les aventures des uns et des autres.

En cette première journée de navigation, les vents sont plutôt nord-nord-est, ce qui nous fait faire un prés très serré, la mer est encore houleuse, le bateau avance lentement, Bébék Tutu est fidèle au poste, il barre à merveille New Life. Pour l’instant l’allure n’est pas franchement confortable, mais ça ira mieux d’ici quelques heures. Il nous faut reprendre le rythme du large. La ligne est à l’eau. En fin de journée, elle se déroule rapidement, Thierry a de la peine à la remonter, la prise est grosse. Marvin se met à pleurer en pensant qu’on a attrapé un requin. Nous tirons la bête une bonne dizaine de minute afin de la fatiguer et éviter que la ligne ne casse lorsque nous la sortirons. Puis à l’aide du harpon Thierry s’aide pour remonter sur le pont un wahoo de 90 cm. On sait ce qu’on va manger ces prochains jours !



Ce soir par contre personne n’a envie de poisson, nos estomacs sont quelques peu barbouillés et on se rabattra sur une demi boîte de cassoulet, qui n’a même pas un succès énorme, puisqu’il en restera pour le lendemain à midi accompagné de darne de poisson cette fois-ci. Les vents ont tournés nord-est, la mer s’est un peu calmée, on a des creux de 2m maintenant, le bateau plonge moins et on avance mieux. Au souper riz et poisson… bon vous aurez compris vu sa taille on va en manger à chaque repas.

Nous naviguons parmi des milliers d’étoiles, le ciel est magnifique, la mer scintille de partout avec le plancton fluorescent qui s’allume sur le passage du bateau, c’est féérique.

Mardi, c’est le 1er avril, ce n’est pas un gag, Roi Soleil et Stélie 4 sont également partis, nous avons une vacation BLU matin et soir afin de suivre l’avancée de chacun. On se retrouvera à Providencia.

La nuit dernière (mardi à mercredi) n’a pas été de tout repos, nous avons traversé un orage, des coups de vent jusqu’à 30 nœuds ont accompagné la pluie, cela nous a obligé à réduire de la toile, 2 ris dans la grand-voile et un demi génois. Puis plus de vent du tout, que de la houle, on ressort le génois au complet, puis un nouveau coup de vent avec de la pluie oblige le capitaine à rouler à nouveau le génois, puis plus rien, il ressort le tout, puis un nouveau coup de vent… etc. etc., toute la nuit, on est un peu cassé au réveil le lendemain matin, mais le soleil est là, la mer s’est calmée, Marvin émerge avec son cri de guerre : maman, j’ai faim, c’est reparti pour une belle journée, chacun ayant retrouvé son rythme de croisière.

Encore de belles rafales pour terminer à quelques miles au sud de Providencia au moteur car il n’y a plus un souffle d’air… c’est la dure loi de la navigation, personne ne me contredira sur ce point !


Nous remontons l’île par sa côte sous le vent, jusqu’aux bouées qui indiquent l’entrée du chenal de la baie de Catalina. Nous avons le soleil de face, ce qui ne facilite pas la visibilité, mais une fois le balisage du chenal repéré – ici aussi il est inversé, on laissera donc la bouée rouge (babord) sur notre tribord – nous rentrons dans la baie et ancrons devant le village de Santa Isabel.

Nous avons profité du trajet pour nous instruire un peu. L’île de Providencia le long de la côte du Nicaragua, tout comme celle de San Andrés sont sous souveraineté colombienne. Les hollandais ont été les premiers à découvrir ces îles au 16ème siècle. Ils en ont été chassés par les anglais quelques années plus tard, qui ont fait venir des esclaves noirs de la Jamaïque afin de débuter les cultures de tabac et de coton. Les espagnols, irrités par le succès britannique les en ont chassé et ont envahi les îles en 1635. Le célèbre pirate Henry Morgan a établi sa base sur l’île de Providencia en 1670. Vu son point géographiquement stratégique, il était aux premières loges pour arraisonner les navires qui croisaient dans les parages et prendre possession de leur cargaison d’or et de pierres précieuses lorsqu’ils remontaient du Panama. La légende dit que certains de ses butins sont encore enterrés dans l’île. La chasse aux trésors est donc ouverte !


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Tarif des formalités d’entrée et renseignements pratiques

Cruising permit 60 jours incluant la commission de l’agent: 50 US$
Immigration : 20 US$ par passeport

M. Bush, est l’agent maritime en charge à Providencia, il s’occupe des formalités et se déplace à bord avec l’immigration ou on lui rend visite à son bureau. Il est atteignable par VHF canal 16.

Il est possible de faire son entrée à San Andrès, et sa sortie à Providencia. Les 20 US$ par passeport (taxe gouvernementale) ne seront à payer qu’une seule fois, par contre la commission de l’agent sera à payer dans les deux îles.

- Possibilité de remplir les bouteilles de gaz en passant par Mr Busch (bouteilles américaines). Pour les camping-gaz bleues, même en fournissant le bon embout, ce n’est pas possible de les remplir.
- Possibilité de faire du fuel également, en se rendant à la station sur la route principale. Il faut bidonner.
- Possibilité de faire de l’eau en demandant au bar qui fait l’angle à droite du ponton à dinghis. Là aussi il faut bidonner.

A gauche du ponton à dinghis, retraits possibles au distributeur avec cartes bancaires. Deux banques en ville, plusieurs supermarchés, certains acceptent les cartes de crédit, cybercafés, ou wifi sur la place en prenant son portable.

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La partie officielle terminée, nous avons tout le loisir pour découvrir l’île de la Providence. Dès nos premiers pas à terre, nous sommes complètement déboussolés et saoulés ; on ne sait plus où regarder, ça circule, ça bouge de partout, les motos et scooters pétaradent, les voitures klaxonnent, les marteaux piqueurs sont en pleine action, une canalisation a sauté et tout le monde s’active pour la réparer et refaire la route. Que de bruit ! Nous avions perdu l’habitude de la civilisation dans nos îlots des San Blas ! On s’assied vite sur une terrasse, il est urgent de prendre un pot et de simplement regarder ce qui se passe alentours.



Arrivés, ce matin, nous avons eu toute la journée pour nous reposer, lorsque nous voyons Roi Soleil et Stélie pointer leurs étraves à l’horizon en fin de journée, nous les appelons en VHF et leur proposons de souper à bord, il y a encore du wahoo que je vais cuisiner en ratatouille avec du riz. Roger et Christine trop fatigués et encore un peu barbouillés préféreront aller se coucher, Gigi et Lulu seront tout heureux de mettre les pieds sous la table. Ils ont essuyé des grains et des coups de vent encore toute la journée, rendant pénible leur trajet. C’est vrai que, bien ancrés, nous avons pensé à eux aujourd’hui en voyant le temps maussade et les rafales qui s’en donnaient à cœur joie. On a eu cette fois-ci une longueur d’avance et avons subi cette mauvaise météo qu’une nuit, mais il faut dire qu’on était parti un jour plus tôt.

Marvin est tout content, il peut enfin utiliser la trottinette que le Père Noël lui avait apportée, il se régale de glaces, de chocolat et de bonbons.



Le samedi une des attractions de l’île c’est la course de chevaux. Nous nous rendons à Pueblo Viejo pour assister à l’une de ces compétitions. 5 ou 6 chevaux étaient présents (c’est loin d’être Longchamp), mais la distraction était agréable. Les chevaux, montés à cru, s’élancent, seuls ou à deux le long des plages, au plus grand amusement des islois qui font quelques paris.



Nous quitterons la plage après les courses, en voyant arriver plusieurs pitbulls que leurs propriétaires s’empressent de montrer leurs exploits. Un de ces chiens a décortiqué une noix de coco dans sa boque en moins de 30 secondes, avec la seule force de ses mâchoires, puis son maître, le fait grimper à un arbre. Fier des capacités de sa bête, il n’hésite pas à provoquer un autre pitbull, sous les encouragements des personnes présentent afin qu’il la laisse aller pour le combat. Nous ne voulons pas assister à ce genre de spectacle ni savoir si combat de chiens il y a, nous préférons nous retirer,…



… rentrant à pied, afin d’admirer les habitations colorées, style créole du coin.



La vie est « cool » à Providencia. Les gens sont super accueillants et toujours prêts à rendre service, à nous renseigner en entamant un brin de causette, à nous offrir un lift en voiture jusqu’à leur destination. Aucune agressivité, le temps coule comme un long fleuve tranquille et personne ici ne se prend la tête. L’espagnol et l’anglais sont appris dès le plus jeune âge ce qui fait que tout le monde ici est bilingue, voire tri, car il faut y ajouter le créole du coin, ce qui donne un mélange d’anglo-espano-créole, qui est difficile à capter, mais on se débrouille très bien avec les deux autres langues.

Depuis une quinzaine que nous sommes dans les parages, les gens commencent à nous reconnaître et c’est des poignées de mains dans la rue, des signes amicaux ou des bavardages à chaque occasion qui se présente. Pour visiter l’île, qui n’est pas très grande, on se déplace en « collectivo » gros 4x4 avec pont arrière ouvert qui nous emmène où on le souhaite pour 2'500 pesos (1,25 US$) quelque soit la longueur ou la durée de la course (ils ne prennent pas beaucoup de risque puisque l’île ne fait que 16 km dans sa longueur !). Il suffit de sauter à l’arrière et cheveux au vent de se laisser vivre, la musique du pick-up diffusant à plein volume du Bob Marley.

Un jour nous enfourchons des motos, avec chauffeur, Marvin et son papa comme passagers d’une moto et moi d’une autre où j’ai tout juste la place pour m’asseoir tant ma conductrice a de l’embonpoint. Il est fréquent de voir passer des motos ou scooters avec 3 ou 4 personnes à dessus, le port du casque n’est pas obligatoire, de toute manière il fait trop chaud. Nous nous retrouverons à la plage de Manzanillo au sud de l’île où Marvin s’en donnera à cœur joie avec un pneu attaché à un cocotier, que son papa élance à la surface de l’eau.



L’école le matin, internet ensuite, afin de mettre à jour le blog et de répondre aux 160 e-mails qui nous attendaient dans la boîte aux lettres, je passe quelques heures assise sur un coin de trottoir pour bénéficier du wifi qui selon les jours passe plus ou moins bien. On en profite pour contrôler la météo et nous décidons de lever l’ancre d’ici 2 jours. Nous l’annonçons aux copains. Lulu, nous dit, tu fais comme tu veux, nous on ne bouge pas, as-tu vu le front froid qui descend ? Nous ne l’avions pas remarqué sur les cartes météo et mal interprété ces dernières. Nous changeons d’avis préférant écouter la voix de la sagesse. Bien nous a pris, puisque ce front froid avec du vent soutenu nord-est et une houle importante, descend jusqu’à Panama. Nous sommes dans sa trajectoire.

De la pluie et un temps gris ne suffiront quand même pas à faire le plein de nos réservoirs, il nous faut bidonner. Le capitaine se bloque le dos en faisant un faux mouvement en montant l’eau à bord avec les jerricans, il est HS depuis deux jours et se repose. Le soleil pointant à nouveau son nez on décide avec le moussaillon d’aller faire une balade en forêt, sur l’île de Catalina,



histoire de voir le mouillage d’en haut, de cueillir quelques fruits en forêt, de se dégourdir les jambes…



… chemin faisant nous apercevons de beaux épineux, une termitière énorme, une araignée pas triste non plus, ainsi que quantité de lézards et d’iguanes,



pour ce qui est des fruits, nous rentrons bredouilles. Qui sait la prochaine fois serons-nous plus chanceux.

Roger et Christine lancent l’idée d’un barbecue viande cette fois-ci pour changer du poisson. Tout le monde est partant et on se retrouve sur la plage.



Une balade à Aguadulce nous fait rencontrer Maria ; une française, bourlingueuse, qui a décidé de poser son sac dans cette île paisible avec son mari il y a quelques années. Veuve depuis peu, elle continue à exploiter sa petite boutique de souvenirs, d’artisanat local, elle fait également librairie, échange de bouquins (en français notamment), ce qui nous permet de refaire un plein de lecture nouvelle.



Nos narines sont attirées tout à coup par une odeur que nous décidons de suivre. Au milieu d’Aguadulce, de la canne à sucre est broyée, puis chauffée dans de grandes bassines, écumée, réduite, mélangée à de la coco, elle fera d’excellents petits gâteaux. Nous suivons le procédé avec intérêt en goutant, avant qu’il ne soit chauffé, de ce jus succulent avec des glaçons. Vu la couleur du gobelet qui nous est offert, Marvin préfère s’en passer en disant qu’il n’a pas vraiment soif.



Nous profitons de refaire un plein du bateau avec des denrées qui commençaient à manquer. Quelques gros chargements de boissons et de boîtes. Je refais un peu de conserves de viande. Il est toutefois difficile de refaire un plein de fruits et légumes frais car leur fraîcheur laisse souvent à désirer. Tout est conservé dans des réfrigérateurs, ils sont hors de prix et personne n’en achète vraiment ou par petite quantité, ce qui fait qu’il n’y a pas de tournus. Quant au respect de la chaîne du froid pour les charcuteries, il nous laisse sceptique lorsqu’on voit des paquets de jambon prêts à éclater tant ils sont bombés.

Partant pour une balade, hier nous apprenons qu’une fête de la musique et de la culture est organisée au village de Casabaja. L’hésitation n’est pas longue, nous changeons nos plans, avertissons les copains restés à bord et sautons dans un collectivo pour nous rendre à Casabaja…

Arrivés sur place, c’est un petit concert, sans prétention aucune où des groupes musicaux se succèdent dans une ambiance bon enfant. Nous passons un super moment et découvrons un nouvel instrument : la mâchoire de cheval. On en joue en frottant une baguette de bois afin de faire résonner les dents. Chacun se laisse emporter par la musique, les pieds tapent la mesure, le rythme est bon, certains s’élancent pour quelques pas de danse…



…puis c’est le silence total lorsque le « papi », qui était assis dans un coin, sa guitare en main, prend place au milieu de la salle et gratte quelques morceaux. C’était tout simplement émouvant.



Samedi 19 avril, l’île est en effervescence, un cruising line a jeté l’ancre au large, les chaloupes y emmènent leur lot de touristes. Des étales avec l’artisanat local sont montés, des peintres sont installés un peu partout, les collectivos et taxis attendent en file indienne pour embarquer du monde et leur faire visiter l’île. Dans un petit resto, près du point de débarquement, les groupes musicaux de la veille sont venus eux aussi faire découvrir leurs rythmes endiablés… malheureusement dans la plus grande indifférence de ces touristes trop pressés pour apprécier leur voyage à sa juste valeur.

Le lendemain, nous partons à 3 dinghis (par mesure de sécurité car la mer est houleuse sur la côte au vent) pour faire le tour de l’île de Catalina et monter à travers la végétation luxuriante Au tournant de la première pointe, un rocher à visage humain…



…dans une autre baie, nous laissons les dinghis sur ancre et partons en balade, jusqu’à la maison du « mafioso ». Un trafiquant de drogue qui s’était fait construire une belle demeure, avec piscine, tout en haut de Catalina. Il s’est fait prendre pour trafic il y a une vingtaine d’année et sa maison est à l’abandon depuis.




Depuis deux jours les prévisions météo s’améliorent et seront calmes pour la semaine en cours. Nous lèverons l’ancre demain matin le 22 avril pour Guanaja, au Honduras. C’est de là que je vous retrouverai et vous donnerai d’autres infos.

Mais d’avance merci de ne pas envoyer des dizaines de courriers si vous n’avez pas de nos nouvelles immédiatement. Le trajet peut durer 4 jours comme une semaine, voire plus, si nous nous arrêtons en route sur les cayos Vivorillo ou Cojones et décidons d’y prendre du bon temps. Tout dépendra du vent favorable ou des conditions de navigation que nous aurons. Tout comme moi vous connaissez le dicton : Pas de nouvelles, bonnes nouvelles !

Avec nos meilleures pensées à tous. Les New Life en balade

mardi, 8 avril 2008

San Blas (4ème partie et fin)

Voici la 4ème et dernière partie de nos aventures aux San Blas. Bonne lecture à tous, encore un peu de patience pour les réponses personnelles à vous e-mail, ce sera fait, ces prochains jours.

Nous espérons que vous aurez apprécié le voyage au pays des Kunas.

Nous sommes actuellement à Providencia, île colombienne le long de la côte du Nicaragua. Tout va bien.

Bonne lecture

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Les enfants nous tiraillent de toute part, les femmes se cachent moins et les hommes sont toujours prêts à faire un brin de causette, à nous montrer comment ils taillent leur cayuco à l’herminette, à nous faire partager leur quotidien, notamment leurs corvées en allant chercher de l’eau au rio et en s’occupant de leurs plantations.





Pour ma part, je sympathise avec la communauté féminine en les regardant broder les molas, en partageant leurs soucis d’allaitement, de soins et de bébés. Il va se passer un événement que je ne suis pas prête d’oublier et qui va me retourner le cœur plusieurs jours durant. Une grand-maman vient me voir, un bébé de deux mois dans les bras, elle me dit que si je le veux, je n’ai qu’à le prendre. Il s’appelle Aladin, sa maman est morte lors de l’accouchement et elle ne pourra pas remplacer sa fille pour élever cet enfant. Elle lui donne le sein afin qu’il ait le réflexe de succion puis passe au biberon de lait en poudre.



En rentrant au bateau, on en parle en famille et Thierry me dit qu’il n’est pas contre, s’il s’agit de sauver une petite vie, Marvin se dit que ce serait sympa d’avoir un petit frère. Oh la la, je suis hyper mal dans ma tête, quantité de questions tourbillonnent. On est mal barrés, l’Ambassade Suisse pour la région se trouve au Costa Rica, les formalités doivent se faire à Panama, après l’accord du sahila bien sûr, les enfants ici ne sont pas répertoriés et il est impossible de sortir du pays avec un enfant non déclaré. On se donne quelques jours pour réfléchir posément et prendre la bonne décision. Pendant ce temps je passe encore plus de temps avec les femmes et je m’aperçois que le petit Aladin n’est pas si malheureux que ça. Plusieurs mamans qui halètent elles aussi prennent Aladin à leur sein complétant ainsi le lait en poudre qui coûte cher et qui ne se trouve pas sur cette île. Tout le village s’occupe de ce petit comme du leur, la grand-maman, avec qui j’arrive à parler grâce à Bredio qui me sert de vocero (interprète) me dit qu’elle était désemparée lorsqu’elle m’avait proposé l’enfant, mais qu’avec l’aide de la communauté, elle arriverait à l’élever dans la tradition et les coutumes de son peuple. Nous voilà donc quelque peu soulagés, nous leur achetons des molas afin qu’ils aient de l’argent pour se procurer le lait en poudre nécessaire. Un bateau français croisant dans le coin avec un enfant de 5 mois, leur donnera les habits trop petits de leur garçon et le couffin dont ils ne se servent plus. Le petit Aladin nous semble bien paré. Nous passerons le message aux bateaux que l’on croisera et qui se rendront dans le coin afin qu’ils, tout comme nous, aident cette famille pour qu’elle puisse acheter du lait en poudre.

Ce matin, debout à l’aurore,



nous partons en ulu pour remonter en compagnie de Pierre et Catherine du bateau Lara, le Rio Gangandi, afin de nous rendre aux villages de Gangandi et de Mandialla. Le premier village est à 2h1/2 de marche, pour le second il faudra encore marcher 1h 1/ 2 à travers la jungle,


Avec Marvin nous nous arrêterons au premier village, il fait chaud, il a déjà marché jusque-là, nous ne voulons pas le dégoûter, nous préférons attendre Pierre et Catherine à Gangandi. Nous profitons d’une baignade rafraîchissante dans le rio, sous l’œil amusé des enfants et lorsqu’une petite faim se fait sentir, nous nous rendons à la tienda du village et achetons du riz, des oignons et une boîte de thon et demandons à une famille si elle accepterait de cuire notre repas. Ce qu’ils font volontiers en nous invitant dans leur hutte afin que nous soyons à l’ombre.



Dans l’après-midi lorsque Catherine et Pierre nous rejoignent, nous sommes bien reposés et pouvons repartir d’un pied ferme pour le retour, Thierry aidant juste notre explorateur pour les passages délicats.



Il n’est que 20 heures et nous sommes déjà couchés, la marche d’aujourd’hui nous a anéanti, nous n’avons plus l’habitude de porter des chaussures fermées et nos pieds ne demandent qu’à être en éventail, qu’à cela ne tienne !

Changement de programme aujourd’hui, nous sommes le 10 mars, les grandes vacances sont terminées, les écoles reprennent. Les petits vont à l’école comme bon leur semble, même tout nu, quant aux grands, ils enfilent leur uniforme scolaire pour se rendre en classe. A la récré nous croisons un professeur à qui nous demandons si une visite en classe leur ferait plaisir, nous avons des puzzles, des cahiers et des livres pour les tous petits dont nous n’avons plus l’utilité. Ce serait l’occasion de faire un petit cours de géographie avec les plus grands en nous présentant, en leur indiquant d’où nous venons et comment nous sommes arrivés jusqu’ici, leur dire que leur copain Marvin avec qui ils jouent ces jours suit l’école, tout comme eux, mais à bord. L’initiative est acceptée, l’échange est intéressant.



Lilian fête ses deux ans,



On se retrouve sur Tupsuit Pippi pour le fêter, entourés de tous les enfants du village. Du flocon d’avoine, mélangé à de l’eau chaude, c’est la boisson d’usage pour les enfants lors d’un anniversaire. Marine a acheté ce qu’il faillait et Chibo, la femme de Bredio, se propose de préparer cette mixture, quant aux « yachties » présents, nous confectionnons gâteaux au chocolat, aux amandes, crêpes, pain perdu, cookies, Tang orange pour que la fête soit complète, sans oublier les malabars et les bonbons. C’est dans une grande discipline que les enfants font la queue leu-leu pour venir chercher leur goûter. Ils sont enchantés et couraterons dans tous les sens en jouant ensemble. Même le petit Aladin fera partie de la fête.


Nous passerons des jours inoubliables dans ces îles, ils resteront gravés bien profondément au fond de notre cœur, nous savons déjà que le départ sera difficile. La nuit dernière nous avons entendu des chants gutturaux. Lorsque nous descendons à terre ce matin pour acheter notre pain, nous demandons à quoi ils correspondent. C’est le Nele (le soigneur) du village qui est au chevet d’un enfant malade. Il invoque les Esprits protecteurs avec des incantations et des prières, en faisant brûler des graines de cacao et de la bourre de coco. Il demande aussi leur aide en utilisant les nuchus (petites statuettes de bois sculptées) afin que le malade soit vite guéri. Je sais tout ça paraît impossible à l’heure actuelle, mais ici au Kuna Yala c’est une pratique courante, on demande au Nele - qui est sur place - d’intervenir avant d’aller consulter un médecin – qui se trouve, pour le plus proche, à 6 miles de là – sur l’île de Carti. Des médecins se rendent, une fois par mois dans les îles pour les visites médicales en tout genre, vaccinations, aide à l’allaitement, conseils et éventuellement accoucher la femme qui aura la chance de donner le jour à son enfant ce jour-là.

La famille de Bredio vient à bord une dernière fois pour nous dire au revoir le matin de notre départ. C’est la larme à l’œil que je quitterai les Iles Robeson.



Nous passerons cette fois-ci entre les îles et le continent afin de rejoindre Porvenir. Notre moussaillon est à l’étrave, il signale les cailles à son papa qui est à la barre, pendant que j’indique au capitaine les waypoints GPS/ordinateur afin de ne pas trop dévier de la route préparée. Une fois les cailles passées, tout danger est écarté – enfin presque - juste une caille non signalée sur les cartes, Thierry la contourne sans souci. Mais c’est encore une fois la preuve qu’il ne faut pas faire une confiance aveugle aux appareils tout sophistiqués qu’ils soient et que rien ne vaut l’observation. Nous pouvons maintenant larguer le génois, faire route sous voile grâce à une légère brise nord-est de 10 nœuds. Nous mouillons entre Wichubhuala et Nalunega, les îlots au sud de Porvenir. Marvin a les yeux globuleux, il n’arrête pas d’éternuer, il a un peu de température, il fait une grosse sieste, ce qui ne lui est pas arrivé depuis des lustres. Le lendemain, la fièvre est tombée, le rhume s’est installé, une toux l’accompagne. Je sors la pharmacie et lui donne ce qu’il faut, faute de Nele à bord ! Nous faisons tout de même un saut du dispensaire de Wichubhuala…



…afin de racheter du sirop pour la toux car il m’en reste juste un fond. Le médecin qui se réveille à 10 h. du matin, s’habille à notre arrivée, il ausculte notre petit bonhomme, le pèse, le mesure, et veut le mettre sous antibiotiques, nous en avons à bord, nous lui laissons donc son stock, sans décider pour autant de mettre Marvin sous antibiotiques pour un rhume et une toux. La consultation et le sirop ne coûteront que US$ 5.00 En sortant, du dispensaire j’aperçois la chaise dentaire…



… je suis heureuse d’avoir fait soigner mes dents à Cartagena !

Les fêtes de Pâques approchant, les autorités vont prendre une bonne semaine de vacances, nous établissons donc les formalités de sortie et attendons une bonne météo pour faire route. Ces jours-ci il y a déjà un ouragan tropical au nord de l’Atlantique et une grosse dépression sur les côtes colombiennes ce qui génèrent des vents entre 25 et 35 nœuds avec une mer de 4 m. à 5 m. au large, ce n’est donc pas le moment de partir, mais nous devons être prêts pour la prochaine fenêtre, car nous arrivons pratiquement à fin mars et si nous ne voulons pas être bloqués par la saison cyclonique (mai à octobre) le long des côtes du Mexique, il nous faut quitter le pays Kuna Yala.

Le lendemain de notre passage à Porvenir, Thierry aperçoit au loin, un bateau qui lui fait étrangement penser à Aguirre, l’ex-bateau de Dany avec lequel il avait tiré ses premiers bords sur le Léman, il y a environ 25 ans. Il veut en avoir le cœur net, nous prenons donc l’annexe et faisons la connaissance de Frédy et Paola, un couple de colombiens, les nouveaux propriétaires du bateau qui s’appelle maintenant El Joshua. Ça fait tout drôle à mon capitaine de le voir là aux San Blas, complètement restauré, faisant du transport de passagers entre Cartagena et Panama. Nous avons une petite pensée pour nos amis Dany et Laurence qui ont vécu une belle aventure sur Ex-Aguirre avec Christian, Christine et leur fils Johnattan.



La météo pour les jours à venir n’est toujours pas propice au départ, nous retournons au Cayo Chichimé où nous avions passé nos premières journées lors de notre arrivée aux San Blas, il y a plus de deux mois. Le temps passe vite ! Je suis bien contente de pouvoir profiter encore un peu de ce petit coin d’Eden. Cette fois-ci nous sommes mouillés sous le vent de Chichimé, nous y retrouvons Cathy et Mimi de Sea Jolly et faisons la connaissance de Michèle et Claude de Bleu Nuage. Thierry profite du calme plat du mouillage sous le vent pour plonger afin de caréner la coque de New Life qui est maintenant fin prêt pour glisser sur l’eau. Une fois ce travail effectué, nous retournons dans le lagon au vent de l’île. Là nous avons plus d’air et pouvons aisément recharger nos batteries, nous sommes protégés par la barrière de corail qui casse la vague, heureusement d’ailleurs car au dehors on l’entend gronder, cette mer déchaînée. La météo ne devrait pas être ce qu’elle est en cette période de l’année, mais comme partout, elle est perturbée, nous attendons donc des jours meilleurs.

De toute manière, nous ne sommes pas malheureux ici, il y a des coins plus horribles pour attendre une bonne météo, non ?



Il nous reste encore la corvée d’eau, nous nous rendons sur Uchutupu Pippi pour ce faire, les puits de Uchutupu Dumat n’étant pas super propres ; c’est la semaine sainte, il y a beaucoup de campeurs venus de Panama pour passer quelques jours sur les îles. L’eau des puits n’a pas le temps de se renouveler sur Dumat vu le nombre de vacanciers. En effet, l’eau que nous récupérons, n’est rien d’autre que de l’eau de mer filtrée à travers le terrain, elle convient parfaitement pour la cuisson, le café, les douches et la lessive, certains la boivent, nous préférons nous en abstenir, d’autant plus que nous avons un petit désalinisateur à bord (5 litres à l’heure) qui convient parfaitement à notre consommation journalière. Nous profitons de notre retour à Chichimé pour rendre visite à Sitio et à sa famille, que nous retrouvons avec joie, il nous propose l’eau de son puits, qui est nettement plus claire puisque personne ne vient de ce côté-ci du cayo. Nous le remercions et acceptons son offre, mais comme nous tenons à être corrects - bien que Sitio ne veuille rien pour l’eau - en partant, j’entame une bonne partie de rigolade avec la grand-mère qui a un caractère du tonnerre lorsqu’il s’agit de vendre ses molas ou winis. Mon choix se portera sur une chemise ornée de perroquets brodés. Panemalo, ce sera avec plaisir qu’on se retrouvera demain.




Le lendemain arrivent au mouillage Diesel Duck, Marlene et Benno que nous n’avions pas revu depuis 2005 à Grenade, Maïlys, Bernard et Marianne que nous avions quitté il y a plus d’un an à Cumana au Vénézuéla et Enata un catamaran avec, à son bord, un couple de norvégien que nous avions quitté à Curaçao il y a à peine un an ; ils rentraient dans leur pays pour donner naissance à leur petite puce. Que le monde est petit quand même, on fini tous par se revoir un jour ou l’autre bien que nos routes soient différentes. Dans ces moments-là, les récits vont bon train, on en profite pour échanger des infos, des adresses chacun faisant partager à l’autre son vécu et ses expériences.

Week-end de Pâques, la météo ne s’annonce toujours pas bonne pour les jours à venir dans la direction que nous avons choisie. Les fronts froids se succèdent sur la côte du Mexique, descendant jusqu’au Honduras, ils rencontrent une mer déjà bien formée par les dépressions tropicales qui sont sur les caraïbes, une basse pression sévit sur la côte colombienne. Tout ça nous amène des vents soutenus de nord-nord-est à 20/25 nœuds avec une houle sur le travers de 4 à 5 mètres. Vous l’aurez deviné, la direction choisie est nord, ce qui nous fait un angle de vent de 30°, beaucoup trop serré pour que nous puissions naviguer correctement, de plus dans une mer pareille, nous n’avons aucune envie d’entrer dans une machine à laver. C’est déjà suffisant lorsqu’on n’a pas le choix et qu’il faut faire avec. Quand on peut s’en passer, on s’en passe.

Dimanche de Pâques nous décidons de retourner à Est Lemon afin de retrouver Amuitz, Roi Soleil, Stélie 4 et La Mandragore. Une fois dehors du Cayo de Chichimé, nous larguons le génois, à la jumelle nous apercevons un bateau jaune à l’horizon. Je tente un appel VHF et oui c’est Quo Vadis qui revient de Portobelo. Marvin n’en peut plus, il va revoir son grand copain Vincent. Nous leur passons le micro, les laissant «chater» un peu.

Le lundi de Pâques, pendant que les hommes s’organisent une partie de pêche, fusil ou traîne, selon la spécialité de chacun, les femmes s’activent en préparant salades, desserts pour accompagner le barbecue de midi. Thierry déclare forfait, il se paie une sinusite carabinée, il préfère donc rester tranquille à bord. Les pêcheurs rentrant bredouilles, il ne sera pas nécessaire d’allumer le feu pour griller les poissons ; ces derniers ayant désertés les fonds marins. Ont-ils suivi les cloches pour aller à Rome ou est-ce l’état de la mer qui les a fait fuir ? Quant aux crustacés, aucune crainte pour eux durant trois mois. Depuis le 1er mars jusqu’au 31 mai, c’est la période de reproduction, nous respectons la nature et les laissons batifoler comme bon leur semble.

Ces derniers temps nous suivons la météo de près car il ne faut pas louper le bon moment pour faire feu. Tous les matins, j’attrape à la radio 8104 Chris Parker à 07h40, puis j’écoute à 08h30 le Panama net sur 8107 qui donne les prédictions à trois jours. Thierry, lui s’occupe d’imprimer les cartes NOAA de la Nouvelle Orléans, sur le 12788 à 13h15 pour les 24, 48 et 72 heures. Ensuite, avec Stélie 4 et Roi Soleil, qui s’en vont dans la même direction, on analyse toutes les infos qu’eux aussi récupèrent, on échange nos points de vue et on se dit que ce n’est toujours pas le moment de partir, les vents sont trop nord-nord-est et la mer est vraiment démontée, avec une houle nord-est qui rendrait le trajet inconfortable. Il y a 275 miles jusqu’à Providencia (île de la Colombie le long de la côte du Nicaragua) et tant qu’à faire vaut mieux les parcourir dans de bonnes conditions. De plus, on se dit tous qu’il y a plus mauvais endroit pour attendre non ?

José et Fanfan quant à eux s’en vont vers d’autres horizons, nous passons donc une dernière soirée ensemble à bord d’Amuitz. Fanfan nous a préparé des sushis pour le repas, de la banane flambée en dessert. On s’est régalé et comme d’habitude la soirée était fort sympathique. A quand les retrouvailles ?

Sur Quo Vadis le lendemain, c’est un apéro par comme les autres qui est préparé. Gérard, Claudia et Vincent reviennent de Panama, ils ont profité d’acheter du fromage, du bleu et du pâté, c’est un régal, on avait presque oublié le goût de ces délices.

Dimanche 30 mars, c’est l’anniversaire à Gigi. Tout le monde se retrouvera à la plage pour la fêter dignement, chacun s’étant activé pour faire des gâteaux. Les enfants ont sauté sur l’occasion pour se déguiser et faire les fous.



Aujourd’hui les éléments semblent se calmer pour les trois prochains jours. Thierry prend la décision d’y aller demain. On arrive, grâce à Roger et Christine de Stélie 4, à recevoir juste avant le départ, un téléphone et avoir ainsi des nouvelles de nos familles.



Puis, on s’active donc ranger le bateau, à préparer notre route. Nous quitterons - non sans regret - le Kuna Yala demain lundi 31 mars 2008 après presque 3 mois passé dans ces îles paradisiaques, qui nous ont permis de découvrir une bride d’une autre culture, celle des indiens Kunas, où de magnifiques rencontres, des souvenirs inoubliables, resteront longtemps gravés au fond de notre cœur.



Avec nos meilleures pensées à tous. Les New Life en balade